Les chroniques du Placard, journée de la femme : Diane Chasseresse.
Aujourd’hui, journée de la femme, je quitte le Placard déterminée. D’un pas décidé, je me lance dans une traque ardue : je vais chercher LA petite robe. Trouver la robe est à la fille ce que la chasse aux mouflons ou à la gallinette cendrée est à d’autres. Mais dans cette quête, pas de bottes, pas de treillis kakis, pas même fusil, j’avance en jean-basket armée d’une carte de crédit.
Pourtant, dans cette poursuite, je n’ai rien à envier aux chasseurs les plus aguerris, à part peut être le fait qu’ils évoluent en forêt … Moi aussi, j’avance dans un monde hostile, un monde peuplée de femmes voraces de beautés prêtes à se battre pour ladite robe. Je dois déjouer d’habiles manigances de vendeuse perfides pour m’induire en erreur, je dois éviter leur mannequin en guise de leurres. Quel chasseur confondrait un cerf et une biche ? Elle ne m’y prendront pas ! Je dois aussi laisser aller mon instinct, mon flaire. Il faut remonter des pistes, se faufiler dans tous les coins des magasins, tirer mille manches, zyeuter et jauger mille fois. Cette traque devient vite obsédante, je farfouille, je regarde et je toise toutes mes congénères affublées de l’objet de mes désirs, jalousant toujours leur magnifiques trouvailles. Soudain, alors que tu as réussis à éloigner la vendeuse pleines de bonnes intentions mielleuses telles un piégeux papier tue-mouche, derrière un fourré de pulls, dans un bosquet de noir et de blanc… tu LA vois enfin dans son halo de lumière! Tu l’as en joue mais c’est elle qui t’attire, qui te tue, royalement suspendue à son cintre. Evidemment, elle est parfaite ! Evidemment, elle fait de toi LA fille.
Cette victoire n’apaise pourtant rien de ma crise de féminite aigue, au contraire : elle l’exacerbe ! Je rentre donc au Placard, fiévreuse, avec mon butin. Comme toute chasseresse digne de ce nom, n’ayant pas pratiquée la battue (version de la chasse à LA petite robe pratiquée par un groupe de filles aussi hystériques qu’efficaces !) il me faut au plus vite montrer à mes « bestaaaaah » mon trophée ! Mais avant, je dois être sure, sure que je ne me suis pas laissée bernée par une ultime manœuvre de vendeuses mesquines et vérifier que se soit bien LA petite robe et non pas, une robe.
Oui mais voilà quand on vit dans un Placard, si la penderie est un désir, le miroir en pieds est un rêve lointain. Tant pis ! j’enfile cette deuxième peaux, qui vous l’imaginez me va comme un gant et s’enfile avec fluidité. La frustration est trop grande car le miroir est trop petit, 60 cm par 40 (rendez vous compte ! l’architecte devait être un homme négligé !), et surtout trop haut , au dessus du lavabo ! Même si j’avais trouvé LES escarpins je n’aurais jamais atteint la taille de 2 m 30 nécessaire pour voir ma robe dans ce fichu ersatz de miroir ! Je vous épargnerais la démonstration par le théorème de Pythagore qui prouverait que même sur la pointe pieds, même collée à mon placard, je ne verrais rien. L'excitation de la victoire m’inspire mon idée de génie ! Mais ma tête, siège de ma bêtise narcissique se repentira vite : j’attrape ma chaise, je grimpe dessus, ne regardant que LA robe, BAM! je m’assomme sur le faux plafond ! Heureusement, la bosse ne m’empêche pas d’enfiler MA petite robe, elles sont même assorties !
La morale de cette histoire, s’il devait y en avoir une, ne saurait être une hâtive conclusion qui corroboreraient d’affreux stéréotypes sur la gente féminine! Non point ! Cela serait : LA petite robe rend belle, mais pas bête : l ’amour de LA petite robe rend aveugle mais le faux plafond rend la vue!
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